Hors Normes, un film juste, authentique et essentiel sur l’autisme

Hors Normes, le dernier film de Eric Toledano et Olivier Nakache, les réalisateurs d’Intouchables : un film vrai, juste, authentique et essentiel sur l’autisme… A voir absolument… Il arrive juste au bon moment, comme un coup de poing sur la table ou même un coup de poing dans la gueule de la bien-pensance….

Ce film se vit dans l’urgence… Mais c’est l’urgence de l’autisme, celle ou chaque situation peut vriller en une seconde, celle d’offrir à chaque autiste accueilli par l’association, non seulement un autre horizon que l’enfermement psychiatrique et la contention, mais une vie inclusive, une vie le plus comme tout le monde .  On pourrait le croire emprunt de bons sentiments parce qu’il y en a de trop et pourtant il raconte l’histoire de deux associations qui existent vraiment et dont la plupart des protagonistes sont les acteurs du film.

Stéphane Benhamou et Daoud Tatou

Stéphane Benhamou et Daoud Tatou

Et tout y est…même si une heure 50, c’est court pour tout y mettre… Le sujet est tellement vaste, tellement riche et que l’on aurait aimé que cela dure plus longtemps.

  C’est tout d’abord

  • deux hommes, Bruno et Malik (dans la réalité Stéphane Benhamou et Daoub Tatou)  joués admirablement par Vincent Kassel et Reda Kateb,
  • deux associations en région parisienne, La Voix des Justes et l’Escale (Dans la réalité Le Silence des justes et Le Relai Ile de France)…l’une qui prend en charge des adolescents et des adultes autistes voués aux couloirs aseptisés des hôpitaux psychiatriques, l’autre des jeunes de banlieue en rupture auxquels elle propose de devenir les référents des premiers
  • L’un est juif pratiquant, l’autre est musulman pratiquant et ils sont amis depuis 20 ans
  • et tous ceux qui tournent autour de ces deux associations,  les éducateurs, les accompagnants, les parents, les médecins et même les extraterrestres inspecteurs de l’Igas (voir leur rapports)

Comme un film d’action

Il se vit à la fois à 100 à l’heure comme un film d’action, avec adrénaline, courses poursuites, suspens et pourtant l’on perçoit un monde où le temps est différent, ailleurs, comme suspendu…

Le temps de Valentin, autiste non verbal, qui porte un casque de boxe 24 h sur 24 car il s’automutile, celui de Joseph que l’on encourage silencieusement à aller une station de métro plus loin…  (Voir la bande annonce)

Je ne sais pas comment Hors normes peut être perçu par tous ceux qui ne savent rien de l’autisme et qui le découvrent à travers ce film. Bien sûr, on a eu Rain Man, le Goût des merveilles, Monsieur je sais tout, l’Amour d’une mère…. Mais là, c’est différent… La fiction s’ancre encore plus dans la réalité.

Pour moi qui vit celui de mon fils depuis 33 ans, ce film sonne tellement juste, jusque dans les infimes détails…D’ailleurs, Joseph, merveilleusement joué par  Benjamin Lesieur m’a fait pensé à Karim tout le long du film… Je me suis revue essayant de lui faire prendre son bus, son train, pendant des années, faire un pas de plus pour en refaire trois en arrière… Combien de fois l’ai-je suivi en cachette pour voir s’il avait assimilé les consignes… Je me suis revue l’accompagnant à son premier stage…

Quand à sa façon d’aborder la gente féminine, c’est tout un poème pas toujours drôle à vivre tous les jours et le sujet est abordé avec tact. Et pourtant, depuis dix ans que Karim a quitté l’institution, que de progrès. Mais que de fois j’aurai aimé avoir un homme comme Bruno pour répéter en lithanie au téléphone à Karim “Non, tu ne tapes pas ta mère.” (Merci Aziz quand même). On aurait peut-être éviter une bonne partie de nos combats de sumo.

Seulement une fiction ?

Joseph, Benjamin Lesieur,Hors-Normes-2019

Joseph, Benjamin Lesieur

On pourrait croire qu’il y en a de trop, et pourtant, il faut voir le documentaire “On devrait en faire un film” d’ Eric Toledano et Olivier Nakache… On y retrouve les vrais “Bruno”, “Malik”, “Joseph”, “Valentin”… Et l’on s’aperçoit alors que la fiction “Hors Normes” n’est pas éloignée de la réalité. Et même que l’histoire vraie est encore plus belle… Parce qu’elle est vraie.

Il y a 40 ans, le livre puis le film “Vol au dessus d’un nid de coucou” (Et le livre “Asiles” de Goffmann) ont contribué à changer la prise en charge des patients dans les hôpitaux psychiatriques… Puisse ce film amener notre pays vers l’inclusion, enfin… Changer notre regard sur les différences

J’espère que ce film va faire ouvrir les yeux à beaucoup d’instances, dont la justice…. Je pense ici à Rachel et à ses enfants, à Tim, placé dans un établissement par la tutelle alors que sa mère et son beau père se battent à corps perdu pour son retour en famille… Et à tous ceux qui leurs ressemblent…

Quel beau moment plein d’émotion que celui où Valentin enlève son casque…

Et dans la vie ?

C’est un Bruno qu’il faudrait à Dimitri Fargette pour le sortir enfin de son hôpital psychiatrique, lui qui n’en connait que les murs depuis plus de 30 ans.

L’autisme, c’est 600 000 personnes en France, avec des parents, des frères et sœurs dont la vie quotidienne est secouée, malmenée… L’autisme, c’est 8000 enfants qui naissent autistes, chaque année. L’autisme, c’est souvent des mamans solos au RSA ou en petit temps partiel qui se battent contre les préjugés, les services sociaux, les préjugés médicaux…

dylan-Hors-Normes

Dylan avec Bruno et malik

Si Stéphane/Bruno obtient de tels résultats avec les cas les plus difficiles, quels résultats pourrions-nous viser avec les 600 000 autistes de France… On a tellement de retard en France dans la prise en charge de l’autisme… L’inclusion en est à ses balbutiements.

Alors, courrez voir ce film, passez un bon moment, et surtout, regardez autour de vous, il y a certainement une famille proche de vous qui a besoin de votre aide… Oh, pas forcément grand chose, pas un engagement aussi total que celui de Stéphane Benhamou ou Daoud Tatou …

Et vous, que pouvez-vous faire  ?

Déjà un bonjour et un sourire au lieu d’un regard qui se détourne, un “qu’est ce que je peux faire pour vous aider” lors d’une crise dans un magasin ou dans la rue, au lieu de passer en vitesse en pensant qu’elle a mal éduqué son gamin…

Et plus si affinité, car vous découvrirez un monde plein de richesses ou des petits ruisseaux deviennent des grandes rivières… La preuve, Stéphane Benhamou… Il a commencé en acceptant un jeune autiste dans sa colonie de vacances….

Juste un petit bémol, dans Hors Normes, les parents sont montrés passifs, débordés, voire démissionnaires, au bord du burn out (superbement interprétée par Hélène Vincent)…

Cela se justifie quand même puisque ces associations s’occupent des cas d’autismes les plus lourds. mais ce n’est pas toujours le cas, heureusement et certains trouvent la voie de leur enfant, je pense à Marie Lettler, Estelle Ast, Meryem et Jean Luc Duval, qui se battent non seulement pour les leurs, mais aussi pour ceux des autres en montant en haut des grues pour réclamer l’inclusion scolaire…

J’en profite pour remercier ici tous ceux qui m’ont aidé quelques minutes, une heure, un jour durant ces dix dernières années et qui ont contribué à donner à Karim une vie qui correspond plus à ses aspirations…

Hors Normes, un film d’ Eric Toledano et Olivier Nakache avec

  • Vincent Cassel : Bruno
  • Reda Katel : Malik
  • Benjamin Lesieur : Joseph
  • Hélène Vincent  : la mère de Joseph
  • Bryan Dialoundama : Dylan
  • Catherine Mouchet : le docteur Ronssin
  • Alban Ivanov : Menahem
  • Lyna Khoudri : Ludivine

 

 

 

Commentaire (1)

  1. M. P:

    Merci pour tes pensées à nous Rita. Je crois cépndant que ce film ne changera rien, comme celui, de Milos Forman dont du parle, n’a rien en réalité changé pour les hopitaux psychaitriques. Seule une prise en comte et révendication des droits, tout comme renaissance des communautés dans le sens haut du terme (c’est pas par hasard que les deux assos sont issues des milieux “communotauristes”, tant décriés) va changer la situation.

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