Nous, les mères d’enfants autistes, on n’est pas des mères surprotectrices et nocives, on est juste des mères à l’écoute de nos enfants extra-ordinaires.
Changez votre regard, vos grilles d’analyse, votre angle d’approche obtu et obsolète.
Vous, qui du haut de vos tours de savoir qui ne connaissez rien à notre histoire et qui en une heure pouvez détruire ce que nous avons bati jour après jour pendant des années, on vous demande de l’aide pour nous soutenir à organiser notre chaos, on ne vous demande pas de ranger nos enfants dans des cases, de nous apporter votre ordre savant et vide de sens pour nous.
Nous avons toutes une histoire différente, nous avons toutes fait comme nous avons pu avec ce que la vie nous a donné, et souvent on ne nous a rien donné ou trop longtemps après…. Nous passons des heures dans vos salles d’attente pour ressortir de vos bureaux avec un sentiment profond de non-écoute. Nous voyons passer les années et ce qu’on a perdu en n’ayant pas pu apporter à nos enfants ce dont ils avaient besoin quand ils en avaient besoin. le temps perdu se rattrape si mal….
C’est nous qui portons la culpabilité de ne pas avoir trouvé la bonne solution, le bon pédiatre, le bon praticien, le bon intervenant, le bon établissement et il n’y a pas besoin de nous en rajouter sur le dos. On est assez grandes pour cela. Et vous nous rajouter par dessus la culpabilité d’être de mauvaises mères !
L’autisme, c’est une autre monde
L’autisme, c’est un autre monde. Un monde que vous ne connaissez pas. Un monde dont vous n’avez pas les codes (nous non plus d’ailleurs, mais nous avons l’excuse de ne pas être des professionnels et de ne pas gagner notre vie sur la détresse des autres)…. Il y a des pays où la connaissance sur l’autisme est plus avancée, mais en bons chauvins nous n’en parlons pas la langue ou pas suffisamment pour lire les données et les analyser. Il y a les autistes de haut niveau, dont certains ont pu expliquer de l’intérieur leurs ressentis. Ils ont écrit des livres pleins de pistes, les avez-vous lu ? (Temple Grandin, Joseph Schovanek, Daniel Tamet…) Les avez vous lu ? Mais sautez dessus, il y en a tant à apprendre !
Pendant sa petite enfance, nous passons plus de 8000 heures par an près de notre enfant, nous connaissons toute son histoire, son historique pour faire plus savant, ses bobos, ses insomnies,ses faiblesses, ses forces, ses fixations, ses frustrations, ses joies, ses peines… Avant ses 20 ans nous franchirons le cap des 100 000 heures….Nous sommes toutes docteur es sciences de notre enfant, des spécialistes qui s’ignorent parce que nous croyons que c’est vous qui détenez le savoir, alors que souvent, durant vos études, vous n’avez que peu ou même pas abordé le sujet de l’autisme.
Quand nous sommes dépressives, ce n’est pas la plupart du temps à cause de l’autisme de notre enfant, c’est d’être épuisées par votre incompréhension, votre non-écoute, vos offres d’aides inappropriées….
Ce qui nous révolte le plus, c’est notre impuissance
Nous sentons, tout au fond de nous, qu’il y aurait des solutions pour que notre enfant progresse, mais nous ne savons ni ou ni comment y avoir accès, parce que vous nous tenez à l’écart des prises en charge, c’est tellement encombrant une mère. Et nous devons nous montrer heureuses et satisfaites qu’on nous ait proposé une place.
Oui, nous sommes fusionnelles car nous devons anticiper, deviner à un sourcil qui se fronce, à une ombre dans le regard, à une main qui papillonne, à un cri, dans des phrases ou des signes souvent incompréhensibles pour les autres et pour vous ce que notre enfant veut nous dire…. Et sans cette fusion, nous serions comme vous, impuissantes.
Bien sûr qu’à l’adolescence cela devient violent, quand les mots qu’ils ont appris ne sont pas assez violents pour exprimer leur mal-être, cette incapacité à se détacher de nous et ce désir profond de liberté car sous l’autisme, il y a le petit garçon ou la petite fille qui a grandi, qui cherche son chemin d’adulte que nous avons truffé de panneaux sens interdit. Il a l’âge d’être poussé hors du nid, mais l’incapacité de voler seul de ses propres ailes.
Bien sûr que nous nous trompons souvent, parce que tout ce qu’on nous a appris pour nous occuper d’enfants, tout ce qui est écrit dans les livres, tous les conseils qu’on nous donne ne fonctionnent pas avec le notre, Quand on se trompe, c’est nous qui trinquons, quand vous vous trompez, c’est encore nous qui trinquons, pendant que vous pouvez rentrer calmement vous ressourcer chez vous et passer à un autre enfant que vous allez aussi massacrer.
Selon une étude publiée en 2009 dans The Journal of Autism and Developmental Discorders, on trouve chez les mères d’enfants autistes un niveau de stress du niveau d’un soldat aucombat.(Marsha Mailick Seltzer, directrice de University of Wisconsin-Madison’s waisman Center), seulement nous, nous sommes sur le terrain de bataille H 24, 7 jours sur 7 et quand nous trouvons un établissement pour notre enfant, nous vivons dans l’angoisse que ce n’est pas le bon et ce n’est pas les nouvelles qui nous arrivent d’autres mères qui nous rassurent (voir ce qui arrive à Loïg
, Timothée, Dimitri, Xavier et bien d’autres….)
L’autisme, c’est une différence, pas une maladie
Nos enfants sont autistes, pas forcément malades…. Autiste, c’est être différent, c’est un fonctionnement différent du cerveau et pas forcément une pathologie. Être autiste, c’est en partie n’avoir pas les bonnes clefs pour interpréter le monde, la relation à l’autre. Il peut s’y rajouter des déficiences diverses.. Mais il est possible, avec les bonnes méthodes, beaucoup de patience, d’obstination et d’amour de partager les clefs ,de leur apprendre à s’en servir, , de leur apprendre à communiquer, apprendre à apprendre, apprendre à regarder, à vivre, à aimer. Et ça, de l’amour, de la tenacité, de la patience, de la pugnacité, nous en avons à revendre. Ne les amputons pas de tranches de vie, de partages, d’expériences, la vie et encore la vie.
Aidez-nous quand nous en avons la force, le désir, la volonté.… Aidez-nous au lieu de nous mettre tous les bâtons dans les roues… pour nous faire culpabiliser un jour d’avoir baissé les bras. Aidez-nous à réfléchir, à expérimenter, à faire progresser notre enfant différent, à grandir avec lui, à l’aider à devenir un adulte autonome et heureux, à l’aider à trouver SA place, quelle qu’elle soit, car c’est seulement quand on le sentira à SA place et heureux que nous pourrons enfin nous reposer….
Si vous êtes vous aussi une maman de ce genre qui en a ras la casquette, vous pouvez laisser un commentaire ci dessous
Et on n’oublie pas les papas sur-protecteurs, il y en a aussi.
Très juste témoignage que je viens de découvrir.
Ce que vous racontez sur notre vie de mère est tellement vrai.
Il y a beaucoup de professionnels de l’autisme qui malheureusement n’en portent que le nom : non formés ni informés, mais pour autant pas moins arrogants.
Heureusement, il y a les autres professionnels, une poignée, ces Français courageux, car il en faut du courage en France pour ne pas nager dans le sens du courant.
France, réveille toi !
Je salue Karim TATAI pour les jolies photos.
Les proutfessionnels de l’autisme !
Que rajouter à tout cela ? Vous avez fait de vos paroles les nôtres et avez tout dit. Merci
Merci joli témoignage au mot près si juste si réaliste si vrai…
Merci pour écrire avec tant de justesse.
Je reconnais entre les lignes ma colère, ma tristesse,ma frustration,
mon amour, l’espoir et la confiance infinie en mon enfant,
un ado maintenant.
Toutes les questions qui restent encore en pensant à l’avenir…
Un pas après l’autre en faisant confiance à son instinct en premier lieu …
Nos enfants ont beaucoup plus de ressources qu’on le pense, le plus difficile c’est d’apprendre à décoder leurs souhaits
Très beau texte. On ne sens plus la colère mais la fatigue, ou plutôt une certaine résignation pas envers notre enfant et son état mais envers ceux et celles qui sont sensés nous aider … Quand je fais le bilan, moi aussi je constate que ce qui m’épuise et me pompe le plus ce ne sont pas les crises de mon enfants mais les querelles de chapelle entre médecins, entre thérapeutes, entre les premiers et les seconds ; les combats pour obtenir des dossiers médicaux quand on ose vouloir changer d’hôpital, la mise en place de systèmes hyper ingénieux pour garder un petit pied au CAMSP, CMP et autres instituts pour rassurer l’école et la MDPH mais où on perd un temps fou pour rien tout en tentant de mettre en place une PEC aidante, et tous les ans la quête de l’AVS et tous les ans ou deux ans les dossiers MDPH, et régulièrement les remarques culpabilisantes, et parfois quand le vase déborde la menace / la solution qu’on vous sort comme ça du placement, ou de l’isolement un temps pour observation, (vous voyez bien vous en pouvez plus et votre enfant et en souffrance) … Les intrusions presque clandestine dans les service CRA pour déposer un dossier parce que injoignable par tél. depuis 15 jours car débordé …
Quand mon fils est devenu adulte, tout s’est arrêté et comme il a souhaité vivre à la maison, à part l’AAH et son renouvèlement, plus aucun rapport avec « les professionnels ». Il n’est pas malade, il est autiste, ce n’est pas la même chose
Je suis la belle-mère d’un adolescent autiste-deficit de l’attention-dyslexique et dysorthographique. Je devrais dire :je ne suis « que » la belle-mère de cet enfant qui vit en permanence avec nous. Certains intervenants refusent parfois de me répondre sous prétexte que je ne suis pas la mère !!! Ca ajoute un problème de plus â tous ceux déjà mentionnés … Merci pour ce texte où je me retrouve tellement ! On se bat pour avoir de l’aide pour ces enfants extra-ordinaires mais nous …. Qui nous qui nous aide? Qui nous supporte dans notre vie de couple ? Il faut beaucoup beaucoup d’amour pour l’enfant et entre le couple pour y survivre !
Je suis heureux de lire ce merveilleux témoignage moi et surtout ma femme le vivons et merci notre fille 16 ans autiste et deux autre eux neuro typique ,, salut du Québec
Merci pour ce texte tellement juste je retrouve dans ce texte les mots qui sont 24heures sur 24 dans ma tete et que je n arrive pas a les exprimer Merci
Merci pour se message qui résume si bien notre vie.
j’ai les larmes aux yeux
Merci pour ce témoignage où chacune d’entre nous se retrouve avec justesse ; mon fils porteur d’un autisme sévère a aujourd’hui 19 ans et j’ai refait notre parcours, pas à pas, à travers votre texte d’une extraordinaire vérité ; aujourd’hui je n’espère qu’une chose c’est qu’il soit heureux…
Ce que la vie m’a appris, c’est qu’il n’est jamais trop tard pour agir. Karim, mon fils (autiste avec des déficiences mentales) à 23 ans a refusé violemment de rester dans le groupe occupationnel où il avait une place. Il voulait vivre à la maison…. Jour après jour, nous lui avons construit un réseau, une vie à sa hauteur. Non seulement il est heureux, mais il fait des progrès, jour après jour. Des progrès de langage, de communication, de comportement. Il y a 6 ans nous étions au bord de la médicamentation. Non seulement il n’en prend toujours pas, mais ses colères fulgurantes se sont espacées, malgré ses angoisses que nous lui apprenons à gérer, ses stéréotypies qu’il apprend à maîtriser un temps….. La vie est plus sereine pour chacun… Il faut continuer à rêver et croire en votre fils. J’adore ce conseil de Guy Bolduc, un papa d’enfant autiste à un autre papa : Foncez comme si personne n’allait jamais vous aider et prenez toujours la responsabilité de défoncer les portes vous-même pour votre fille. Toute l’aide que vous recevrez de l’extérieur sera donc un cadeau.
Magnifiquement bien écrit, rien a ajouter.tout est dit!!!
Un texte tellement vrai! Dans votre texte je retrouve: une partie de mon quotidien, une partie de mes émotions et surtout LA douloureuse et piquante réalité!
merci…………..les mots sont juste…
Vous avez magnifiquement bien exprimé nos ressentis ,nos angoisses et nos espoirs à l’égard des thérapeutes…. Ce qui a été fait à Loig est une honte!!!
Merci.mon fils à 23ans,il adore la musique qui le porte et le fait évoluer à son rythme…il est heureux : c’est ça l’important.
Nous avons toujours refusé de le médicaliser,nous apprenons régulièrement à gérer ses angoisses.
Courage et soutien à tous les parents
Tout est dit dans ce témoignage criant de vérité… bravo
Tout est dit c’est tellement vrai et quand en plus il faut gérer un travail ou il faut être à 100 % c’est plus qu’un champ de bataille. Mais vous avez tous dit votre texte est parfais merci !
Merci d’avoir pensé aux papas dans la petite note finale … interprète traducteur expert hyperprotecteur soigneur veilleur nourrisseur chamane et tout ce qu’on veut, on est parent on vit pour nos enfants ….
Merci, pour ce beau texte, j’ai deux enfants, qui d’après les spécialistes, ont un très faible taux d’autisme. Mais ma famille et les gens en général, me disent que je manque d’autorité, que je les protéger trop, que je me fatigue pour rien. Mais ils en ont besoin, ils ont besoin d’une personne qui les sécurisent, qui les comprennent. C’est ma vie. Merci