AVC, de la dépendance à l’autonomie, jusqu’où et à quel prix ?

Il y a un an et demi, je vous parlais de l’AVC de maman… et de tout le travail qu’elle a accompli pour pourvoir remarcher malgré son hémiplégie et les diagnostics médicaux et reprendre sa place dans la vie… Maman, c’est un warrior… Une têtue aussi, quand elle a quelque chose dans la tête, elle ne l’a pas aux pieds et depuis son AVC carabiné, elle n’a qu’une pensée en tête, sortir de la dépendance et retrouver son autonomie…. Je vous avouerai que parfois, il n’y a qu’elle qui y a cru, mais jour après jour, avec la force de la volonté elle a creusé son chemin vers cette autonomie tant désirée….

La dépendance, c’était quoi ?

Après trois mois et demi en centre de rééducation avec une kinésithérapeute et une ergothérapeute extraordinaires (et un médecin plutôt médiocre et pas à l’écoute), elle rentrait à la maison.

  •  arrivant à faire quelques pas avec un déambulateur mais pratiquement toute la journée dans un fauteuil ou une chaise roulante
  • dormant dans un lit médicalisé
  • avec des aides pour lui faire les repas, la faire manger, lui faire le ménage
  • une gastrostomie car ce qu’elle mange ne suffit pas
  • avec des infirmières pour la faire lever, la laver et l’habiller
  • avec des heures passées dans son fauteuil à regarder la télévision (même si elle a découvert qu’il y avait Arte et la 5) ou à lire (elle qui ne lisait pas, je crois qu’elle a rattrapé le retard accumulé pendant toute sa vie)

Sortir d'un AVS Devenir Capable autrementOn a aménagé la maison par rapport à cette dépendance… Les pièces se sont remplies du matériel médical conseillé..

Rien de plus ou de moins finalement que la vie de beaucoup de personnes âgées rentrant chez elles après un séjour à l’hôpital et en centre de rééducation pour un bon nombre de pathologies…. Celle dont on s’accommode peu à peu en disant que c’est la vieillesse et la maladie sans compter le destin et la résignation…

Mais c’était ne pas connaître maman et sa tête de cochon… (Vous en faîtes pas, elle nous énerve parfois, parfois souvent même, et l’on s’était tous plus ou moins à différents niveaux résignés à cet état, d’autant que le corps médical, les médecins en l’occurrence disaient que déjà, c’était extraordinaire et qu’elle devait être heureuse d’avoir récupéré comme cela.

L’autonomie, c’est quoi ?

Pour maman, l’autonomie, c’est reprendre sa vie d’avant…. Alors, forcément c’est tout un programme et pour elle, ça ne va pas assez vite et ce n’est jamais suffisant… On a beau lui dire « tu ne te rends pas compte de tout ce que tu as accompli… » Pour elle c’est « Avant je faisais ça, alors y’a pas de raison que je n’y arrive pas »

Alors, elle y a été à coup d’objectifs

  • S’habiller seule et faire sa toilette
  • Se lever seule de son lit pour aller aux toilettes la nuit et supprimer la couche nocturne
  • Manger pour se faire retirer la « boutonnière » de la gastrostomie
  • Se faire à manger parce que ce que lui préparait l’auxiliaire n’était pas à son goût
  • Supprimer le déambulateur
  • Supprimer le fauteuil roulant (quelle victoire quand elle a pu le rendre)
  • Monter et descendre les escaliers
  • Oser sortir seule dehors pour marcher (déjà, pour quitter la maison, il faut passer le cap de la pente du garage et le changement d’équilibre que cela représente)
  • Supprimer le lit médicalisé… Chaque nuit, elle allait dormir dans un autre lit de la maison jusqu’à ce qu’elle ait mal et qu’elle retourne dans le lit médicalisé…
  • Supprimer l’infirmière le soir pour le coucher
  • Supprimer l’infirmière du matin pour le lever (ah mettre ses bas de contention toute seule)
  • Supprimer l’infirmière pour la douche (descendre les escaliers pour pouvoir prendre sa douche toute seule)

Mais c’est un combat de tous les jours, entre fatigue, petites victoires et déceptions… Et chaque jour le soleil se lève…. c’est un combat qui ne s’arrêtera qu’avec elle ou quand elle décidera de baisser les bras…

Un combat de tous les jours

 

maman déguisée en Sangoku pour les 30 ans de son petit fils

On l’a bien vu avec la canicule… Elle avait moins de peps et est restée plus que d’habitude dans son fauteuil et la canicule se prolongeant, cela a duré…. Jusqu’à ce qu’elle s’aperçoive qu’en fait, elle était en train de perdre ses acquis et la mobilité qu’elle avait si chèrement gagné…. Solution, sortir très tôt le matin ou tard le soir à la fraîche (relative)…Alors, il faut trouver le juste équilibre entre le repos et l’action, suffisamment pour ne pas perdre, mais pas trop pour ne pas s’épuiser, et cela n’est pas tous les jours évident.

A cela s’ajoute le fait qu’elle devrait se faire opérer du pied… Mais elle angoisse à savoir qu’elle va avoir une longue période d’immobilisation… Choix cornélien, continuer à supporter la douleur et une vie à peu près autonome ou tenter l’opération au risque de redevenir dépendante….

Vous avez compris, elle a repoussé l’opération aux calendes grecques, d’autant que depuis deux semaines, elle a repris la conduite, à notre grand dam… Mais aucun médecin, ni aucun soignant ne l’en a dissuadé…. que pouvons nous dire quand le médecin a dit que c’était possible.

Bon, pour ceux et celles qui sont monté avec elle, elle conduit comme avant… Elle ne va pas loin, mais cela lui permet de sortir de son village où il n’y a aucuns commerces, de chercher son pain, faire ses courses, aller chez sa kiné, chez son médecin, aller voir une amie et surtout avoir enfin après un an et demi la satisfaction de n’être à charge de personne…

Il reste quand même la dame qui vient faire le ménage, le monsieur qui s’occupe du jardin…. et sa famille pour l’emmener en promenade, en vacances, au spectacle, bref, savourer encore la vie avec plaisir, tant qu’il en est encore temps…. elle vient parfois dans mon atelier tirer l’aiguille avec moi…. Enfiler une aiguille, vous pensez, quand il y a deux ans, elle n’arrivait pas à rentrer un gros bâton dans un trou !!!

Elle continue à faire son fameux gâteau au chocolat, a plus d’appétit quand on est plusieurs à table. Il y a des jours avec et des jours sans, des jours où elle est trop faible et des jours où elle est en forme alors elle prend la vie comme elle vient (en râlant un peu sur ce qu’elle ne peut plus faire…)

Avec des plaisirs que l’on savoure d’autant plus : trois mariages dans l’année dans la famille, la

naissance de son deuxième arrière-petit-fils, les 30 ans de son petit-fils…

Bien sûr, ce n’est plus comme avant et les années passent rajoutant leur poids.Elle fête cette année  ses 83 ans

Mais que serait-elle devenue si elle n’avait pas été aussi têtue ? Quel est le sort de ceux qui n’ont pas cette force ni l’accompagnement nécessaire ? Car bien sûr, tout cela, elle ne l’a pas fait que pour elle, elle l’a surtout fait pour nous, pour continuer à être des nôtres.

En tout cas, chapeau maman…. quel exemple pour nous, ta famille…

 

 

 

Commentaire (1)

  1. Dany

    Bravo à ta maman, c’est extraordinaire ce qu’un être humain peut réaliser….même dans des situations très compliquées

    Répondre

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