Autisme, formation, inclusion, ça va trop lentement

CP Karim TATAI

En France, nous les parents d’enfants autistes, nous avons souvent l’impression que tout n’est pas fait pour que nos enfants puissent avoir les meilleures chances d’évoluer et de s’en sortir, car finalement, ce qui nous intéresse, après la course au diagnostic, aux prises en charges de la toute petite enfance, c’est lui trouver une place, si possible dans une école, où il puisse apprendre, progresser, s’intégrer et devenir un adulte le plus autonome possible, ce que chaque parent rêve pour son enfant.

Au niveau politique, avec un gros, gros retard de réaction  par rapport à d’autres pays européens, la France a pris le virage. Il y a eu la loi de 2005, un premier Plan Autisme 2005-2007 qui a initié au niveau régional la création des Centre Ressource Autisme (CRA),  un deuxième Plan Autiste 2008-2010 mettant, entre autre, l’accent sur la formation des professionnels et intervenants et sur l’orientation des familles.

Nous sommes déjà au quatrième plan autisme et l’école inclusive est enfin poussivement en route…

Attention école CP Karim TATAI

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Une chose est de donner l’impulsion, les objectifs, le cadre légal et les conditions structurelles et budgétaires nécessaires, une autre est de mettre en place sur le terrain les structures satisfaisant pleinement les premiers intéressés : les personnes autistes, mais aussi les familles qui en sont responsables principalement dans l’enfance et l’adolescence.

15 ans à l’échelle d’une nation qui doit créer, déplacer, transformer, former, construire à tous les niveaux de ses administrations et avec toutes les réticences au changement que cela entraîne, c’est un temps « raisonnable », 15 ans, à l’échelle d’un enfant qui attend sa prise en charge adaptée, c’est une vie sacrifiée, sans compter les conséquences au niveau de ses proches.

Et nous, les parents, notre ressenti premier est une profonde colère de voir nos enfants souffrir des remous provoqués par toute cette nouvelle mise en œuvre : rivalités disciplinaires, concurrence des théories et des approches, désaccord sur le choix thérapeutiques…..

Attention École signalisation CP Karim TATAI

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Nous ressentons une grande frustration à nous retrouver face à des professionnels ou intervenants, certes, souvent pleins de bonne volonté, mais pas assez, ou pas assez bien formés. Parce que la formation des professionnels, bien que faisant partie des objectifs du troisième Plan Autiste, ce n’est pas encore ça.

Le rapport de la mission de l’IGAS paru en mars 2016 le dit bien :

Le champ de la formation initiale des professionnels de santé, à commencer par les médecins, des métiers du médico-social, sans parler du monde de l’éducation, laissait encore beaucoup à désirer.(p55)

Les résistances des professionnels attachés au modèle psychanalytique ont entrainé un tel déficit qu’il reste encore aujourd’hui difficile pour les familles et leurs enfants de trouver des modalités de prise en charge adaptées  en proximité.

Attention École signalisation CP Karim TATAI

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Nous nous sommes bien aperçu, à notre niveau, que les méthodes cognitivo-comportementales sont plus efficaces que le modèle psychanalytique auquel sont encore attachés bien des professionnels, et nous les appelons à corps et à cri. Avec elles, les progrès de notre enfant sont visibles au quotidien et nous nous sentons moins impuissants. La Haute Autorité de Santé en a fait ses recommandations, mais cela ne suffit certes pas à changer rapidement les pratiques obsolètes de chefs de service convaincus en toute bonne foi (ou non) de leurs croyances…. Faut-il néanmoins que nos enfants attendent qu’ils partent à la retraite pour bénéficier de prises en charges adaptées ?

Parce que pour nous, c’est l’urgence qui prime. Chaque jour, notre enfant perd des possibilités d’apprentissage, d’évolution, parce qu’il n’a pas la prise en charge optimum pour développer ses capacités, et nous sommes souvent démunis à ne pas savoir comment l’aider.

Attention Ecole CP Karim TATAI

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Bien sûr, nous ne restons pas les bras ballants en attendant que tout le pays se soit repositionné à tous les niveaux, nous créons des associations, petites ou grandes, pour aider un ou plusieurs enfants, pour nous entraider, pour que ceux qui ont ouvert une voie puissent indiquer le chemin à ceux qui arrivent. Nous nous donnons les tuyaux sur tel ou tel professionnel efficace,  nous lisons, ceux qui comprennent l’anglais nous rapportent les avancées d’outre-Manche ou d’Outre-Atlantique, nous nous formons, nous manifestons aussi, nous essayons d’être sur tous les fronts avec nos moyens de parents souvent à bout de force et bout de nerfs, tout en essayant de vivre ou survivre, le plus souvent à temps partiel ou au RSA, portant à bout de bras notre enfant autiste (quand ce n’est pas deux), mais aussi ses frères et sœurs qu’il ne faut pas oublier.

Alors, combien de temps faudra-t-il encore pour que les impulsions gouvernementales rejoignent les attentes des parents d’enfants autistes et des personnes autistes ? Combien d’enfants n’auront pas la chance d’avoir la prise en charge adaptée à leurs capacités ? Il nait 6000 enfants autistes chaque année. Est-ce que tous les bébés nés cette année auront une place à l’école maternelle, en inclusion dans 2 ans ? 100 classes maternelles pour enfants autistes ont été crées en 3 ans, avec il me semble une moyenne de 10 élèves par classe soit 1000 élèves. Que fait-on des 5000 autres ?

Combien des enfants ayant 3, 4 ou 5 ans pourront entrer en CP dans 1, 2 ou 3 ans ? Que vont devenir les autres ?

Les lois de nos désirs....CP Karim TATAI

Les lois de nos désirs….CP Karim TATAI

Il y a urgence et les moyens ne sont pas à la hauteur de la tâche à accomplir. Mais peut-être que créer des classes spécialisées n’est pas forcément la meilleure solution pour accueillir tous les enfants ? D’après le rapport de l’INSEE, il est né 800 000 enfants en France en 2015. Même en admettant qu’il y ai 30 enfants par classe, cela fait environ 26000 classes de même section de maternelle (40 000 s’il y a 20 enfants par classe). Ne serait-ce par plus facile d’inclure 1 enfant handicapé par classe (26000 ou 40000, cela laisse aussi la chance à d’autres enfants porteurs de handicap d’aller à l’école), systématiquement, quitte à réduire, comme le font les Italiens le nombre d’enfants de 5 quand un enfant handicapé est accueilli…. (Et rajouter une AVS formée et bien formée, je rappelle qu’en Italie, l’accompagnatrice est une enseignante ayant fait une année de spécialisation handicap supplémentaire).

Tout en prenant le temps de faire les bons choix, il faut réfléchir vite, il faut agir vite car nos enfants grandissent et nous voyons leurs chances de devenir des adultes libres et autonomes se réduire mois après mois, années après années. Ayons le courage de devenir le pays exemplaire que nous rêvons secrètement être.

 

 

 

 

Commentaires (2)

  1. Keltoum Oukas

    Mon fils, né en 1996, fait partie d’une génération d’enfants autistes sacrifiés … Combien en faudra t’il encore avant de comprendre qu’il faut une prise en charge éducative pour leur donner des chances de vivre mieux..

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  2. Piazza

    Un résumé édifiant sur notre quotidien, sur nos batailles, sur nos inquiétudes de voir grandir nos enfants dans une société qui ne les considère, ne nous considère pas !

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