Centres Autisme Ressource, extraits rapport IGAS mars 2016

En mars 2016, la mission de l’IGAS a rendu son rapport sur l’état des lieux des prises en charge de l’autisme en France. En voici quelques extraits… Vous avez un lien avec le rapport complet à la fin de l’article.

Depuis sa description en 1943 par Kanner, l’autisme a donné lieu à deux approches, l’une psychanalytique et l’autre organiciste. Aujourd’hui, la plupart des intervenants dans le domaine de l’autisme expriment leur volonté d’aborder ces troubles par une approche transdisciplinaire faisant appel à une large palette de professionnels : pédopsychiatres et psychiatres, pédiatres, psychologues, psychomotriciens éducateurs, orthophonistes, chercheurs en sciences cognitives,spécialistes en imagerie cérébrale, généticiens et neurobiologistes.

Cette volonté se heurte encore à de multiples obstacles : rivalités disciplinaires, concurrence entre les théories et les approches, diversité des cas, désaccords concernant les choix thérapeutiques, découragements, tensions avec les familles et entre les soignants. De même, les clivages entre pédopsychiatrie, pédiatrie et psychiatrie adultes constituent également des obstacles.

vigne vierge CP Karim TATAI Strasbourg

vigne vierge CP Karim TATAI Strasbourg

 Les pratiques de prise en charge des sujets autistes ont en effet considérablement évolué au cours de ces trente dernières années. On est passé d’une approche à forte connotation psychanalytique, à la recommandation d’un projet individualisé d’interventions qui mobilise à la fois les professionnels de différents champs et les familles.

Les progrès de la génétique ont bousculé la distribution des pouvoirs et les formes d’articulation entre biologie et psychiatrie. Dans ce contexte, la psychanalyse a progressivement perdu l’«évidence de sa position» et les critiques se sont cristallisées autour de la question de son évaluation dans le champ des troubles mentaux ; la publication par l’INSERM d’une expertise collective en 2004 qui concluait à la:meilleure efficacité de l’approche cognitivo-comportementale dans la plupart de ces troubles a alimenté ce débat.

CONTROVERSES

Enfant-grafiti CP Karim TATAI Strasbourg

Enfant-grafiti CP Karim TATAI Strasbourg

 Des controverses sur les causes possibles de l’autisme existent, aussi bien aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne qu’en France, entre des parents et des associations de parents d’enfants autistes, certaines catégories de professionnels, et les autorités sanitaires. Mais ces controverses sont de nature radicalement différente. En Grande-Bretagne et aux Etats-Unis, elles ne portent pas sur la reconnaissance de l’importance d’un diagnostic précoce, d’un accès à une éducation adaptée, d’une insertion sociale des enfants, ni de la nécessité d’une participation de la famille à l’accompagnement de l’enfant, pour lesquels il existe un consensus. Elles concernent la possibilité d’un effet biologique prénatal (pesticide, aliment…) ou post-natal (pesticide, aliment,mais aussi vaccin) à l’origine de l’autisme.

En France aujourd’hui, un débat subsiste avec pour enjeu la reconnaissance de l’importance d’un diagnostic précoce de l’autisme, la nécessité d’un accès rapide de l’enfant à une éducation adaptée, lui donnant toutes les chances d’une meilleure insertion sociale, et la participation active des familles à l’accompagnement des enfants.

DE NOUVEAUX MODES DE PRISE EN CHARGE

Rêve d'hiver CP karim TATAI Strasbourg

Rêve d’hiver CP karim TATAI Strasbourg

 Les discours sur la transdisciplinarité sont une chose, leur mise en application en est une autre. Il ne suffit pas de faire intervenir des professionnels aux compétences multiples, encore faut-il établir de réelles interactions entre ceux qui ont pour objectif de contribuer à une meilleure adéquation des attitudes thérapeutiques et éducatives pour favoriser l’autonomie, l’adaptation et la communication des personnes autistes.

Pour la mission, il paraît aujourd’hui évident que le développement des capacités de socialisation des personnes autistes ne peut se concevoir sans une collaboration impliquant les enfants, leurs parents et l’ensemble des professionnels. Ce changement de regard doit s’accompagner d’un nouveau déploiement de moyens humains, logistiques et financiers pour adapter la prise en charge à la prévalence et aux évolutions de la connaissance. A cette fin, les CRA doivent constituer un lieu pour favoriser et mettre en œuvre ces approches.

 

Ces difficultés relevées par la mission au cours de son travail ont eu pour conséquence de rendre son travail d’analyse des disparités des résultats et des moyens des CRA, difficile voire impossible. Elles confirment également l’absence de données d’activités fiables des CRA mais plus globalement le manque d’outils performants et pérennes dans le champ de l’autisme ; cela constitue indéniablement un frein au développement de la connaissance et de l’expertise mais aussi une difficulté pour le calibrage de l’action publique et dans tous les cas un empêchement à évaluer l’activité des CRA.

main rouge CP Karim TATAI-Strasbourg

main rouge CP Karim TATAI-Strasbourg

 Parmi les missions des CRA, il en est une qui fait presque l’unanimité, en termes d’objectifs atteints, c’est celle relative à l’information et documentation. Avec des moyens différents, le minimum requis est assuré. Dans les régions visitées, les associations d’usagers ont toujours signalé la qualité de l’accueil et de l’écoute ainsi que la capacité à conseiller de la part des documentalistes en charge de cette fonction. Les familles sont la première catégorie à solliciter les CRA (41,6% des demandes).

Par contre, le site internet que la plupart des CRA ont bien normalement créé n’est pas toujours du même niveau.

 La mission a fait le constat que le soutien et l’accompagnement des familles n’était pas nécessairement considéré comme faisant partie des missions spécifiques des CRA. Certes, les travailleurs sociaux présents dans certains CRA sont souvent les interlocuteurs privilégiés des familles pour résoudre des questions sociales, d’ouverture de droits, de ressources et aussi de soutien. Mais il apparait qu’entre le moment où s’exprime la demande et la mise en place des réponses les plus appropriées pour la personne autiste, il serait essentiel de réfléchir à une politique vis-à-vis des familles et de définir une gamme de services auxquels elles devraient avoir accès. Ce travail n’a pas encore été engagé de manière approfondie au sein de tous les CRA.

Plusieurs études ont démontré l’ampleur des besoins des familles et révèlent l’importance de leur contribution au soutien des personnes autistes. Selon plusieurs représentants d’associations rencontrés, l’évaluation de l’ensemble des besoins d’une famille en lien avec l’enfant ou l’adulte ayant un TED est encore peu développée

De l’avis de différents professionnels, l’offre de soutien aux familles doit s’appuyer sur une connaissance adéquate des besoins (parfois complexes et changeants) des usagers et de leurs familles. De plus, ces intervenants doivent mieux connaître les services offerts par les organismes de leur territoire de manière à orienter à bon escient les parents vers les intervenants les plus appropriés aux besoins qui dépasse largement la question du dossier MDPH.

Des collaborations fructueuses pourraient être réfléchies et construites avec des associations de familles qui offrent déjà divers services de soutien aux familles (maisons de répit, camps de vacances, accueil de jour, hébergement de fin de semaine, etc.).

LES CRA Centres de diagnostic

grafiti femme fleur CP Karim TATAI Strasbourg

grafiti femme fleur CP Karim TATAI Strasbourg

Dans la réalité, les CRA ont été très largement sollicités par les familles, se transformant en « centres experts du diagnostic de l’autisme». Pour beaucoup d’entre elles, les CRA ont représenté, et représentent toujours, le seul lieu en capacité d’apporter une réponse de qualité à cette phase diagnostic. Ils se sont

imposés comme des acteurs de confiance et ont ainsi gagné en légitimité alors que des professionnels sanitaires et médico-sociaux étaient, et parfois sont encore considérés, comme souscrivant encore à des approches psychanalytiques.

 Le troisième plan autisme réaffirme le rôle de recours des CRA en matière de diagnostic : ils doivent constituer le niveau III d’une organisation fonctionnelle graduée qui comporte deux autres niveaux, et réserver leurs interventions en deuxième intention pour les diagnostics et les évaluations complexes. Les diagnostics dits simples relèvent désormais des équipes de terrain et principalement les CAMSP, les CMP et CMPP.

Mais les données d’activité des CRA montrent bien que cette évolution n’est pas encore réalisée partout et qu’on assiste toujours à un rattrapage des situations non diagnostiquées ; au sein des bilans clôturés en 2014, les 6-16 ans sont toujours les plus représentés (53%) et les bilans concernant les personnes de plus de 17 ans représentent 20% des bilans réalisés.

 BILANS ET DIAGNOSTICS

 Les délais de réalisation des bilans restent considérables

Grafiti CP Karim TATAI Strasbourg

Grafiti CP Karim TATAI Strasbourg

La mission a fait le constat de délais d’attente considérables dans les différentes phases du processus diagnostic. Cette situation fait l’objet de critiques massives des associations de familles, qui ne contestent en aucun cas la qualité du travail mené par les CRA, mais se plaignent de l’engorgement de ces centres

Ces délais d’attente constituent un indicateur important de l’inadéquation actuelle des réponses institutionnelles à la situation des personnes autistes.

Les délais d’attente en CRA résultent d’un déséquilibre entre une demande élevée et croissante de bilans et une offre rigide (les organisations et les moyens ne sont pas adaptés, en tout cas jusqu’à maintenant, à l’évolution de la demande). Les délais d’attente résultent de la formation d’un « stock de demandes » qui s’explique par l’incapacité des CRA à effectuer tous les diagnostics demandés au cours de l’année. Le déséquilibre entre l’offre et la demande ne peut être ajusté que par les délais. Plus le déséquilibre sera important, plus les délais seront longs.

 Le rapport de la CNSA note que la demande de bilans a augmenté de 6,5% entre 2013 et 2014. La tendance à l’allongement des délais, devrait donc s’amplifier. Il semble à la mission que la mise en place des structures de proximité, et en conséquence la diminution de l’activité diagnostics des CRA, ne produira ses effets que dans plusieurs années.

Scolarisation

Le troisième plan autisme a inscrit la scolarisation des enfants autistes comme une priorité.

Par contre, la mission a noté que les liens entre les CRA et l’Education nationale varient fortement selon les régions. Alors même que les CRA soulignent le bénéfice d’une mise à disposition d’un enseignant spécialisé dans leur structure aussi bien pour leur collaboration à l’évaluation des enfants que pour l’accompagnement des professionnels et des enfants dans les établissements scolaires, cette action n’est pas développée sur l’ensemble du territoire national

Pour consulter le rapport dans son entier

Commentaire (1)

  1. Lieser

    Bonjour,
    Concernant le diagnostique des adultes, il est juste vraiment dommage que les CRA (tout au moins celui de Montpellier) procède avec les mêmes outils et critères quel que soit l’âge de la personne qui se trouve en face de eux (cad 6/8 ou 50 ans). Par ailleurs, il n’est pas tenu compte, ni des acquis, ni de l’opinion, ni de la propre analyse que la personne peut exprimer (“Mais enfin Monsieur, vous n’y connaissez rien voyons”…). Et encore moins de sa détresse… de fait, ces “experts” ne cherchent pas détecter les personnes supposées autistes mais à leur prouver par A plus B qu’elles ne le sont pas…

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